samedi 28 septembre 2024

Les voitures de Mercure

 1987. Ce jour de Mercure voit encore traîner mes pas d’adolescent sur la moquette orange de l’enseigne Majuscule située alors dans le centre-ville de cette agglomération à environ tente kilomètres de chez nous.

Ma mémoire, trop occupée à se quereller avec l’exactitude de cet instant, refuse de m’en dire plus concernant la météo d’alors. Le soleil a-t-il décidé d’étendre un peu de sa bonne humeur sur ce bitume omniprésent? La pluie est-elle venue déposer un soupçon d’amertume sur cette folle journée sans Ferris Bueller? Ce point de l’article restera à la discrétion de l’oubli. 

Mais pourtant me voilà, tel Albator comme le chantait Franck Olivier en 1984, une fois de plus devant ce rayon qui… rayonne justement en mes yeux tel le trésor du roman de Robert Louis Stevenson. C’est l’un de ces moments précieux, rares, où mon père, de bonne humeur, est enclin à m’offrir un jeu sans raison particulière. Parmi les joyaux présents sur ces étagères où plastique et papier se disputent les parfums caractéristiques de l’endroit, les éditeurs français tels que FIL ou encore Loriciels côtoient les productions OCEAN propulsées par les illustrations de Bob Wakelin.

Source: CPC POWER

Pour autant c’est déjà la nostalgie qui va ici guider mon choix puisque mon dévolu se portera sur le jeu Scalextric édité par Leisure Genius en 1986. Si comme moi vous avez eu des circuits avec leurs voitures propulsées par électricité, ce nom vous évoquera forcément quelque chose même si je suis à peu près sûr pour ma part n’avoir eu que des modèles moins onéreux à l’époque. Impossible non plus de ne pas penser à ces moments passés à feuilleter la section jouets des catalogues « La Redoute » ou encore « Les Trois Suisses », rêvant devant ces fameux circuits.

Ce dont je me souviens précisément c’est la boîte cartonnée du jeu sous forme de coffret à ouvrir. Dans celle-ci la cassette est  maintenue en place par un cadre de mousse blanche lui même recouvert par le manuel d’utilisation. C’est sans doute ce premier détails qui m’avait attiré vers le soft.

La promesse de pouvoir créer ses propres circuits termine de me convaincre et c’est ainsi que nous nous retrouvons à la caisse avec un nouveau jeu de formule 1 destiné à mon cpc 464. Alors que la voiture familiale disperse par ses fenêtres mes pensées à la faveur du paysage bourbonnais, entre fermes abandonnées ou maison résidentielle piégée par la « voie express » comme l’appelle les parents, je réalise que « Scalextric » sera mon second logiciel du genre avec Formula One Simulator de Mastertronic qui fut mon tout premier jeu sur Amstrad cpc (je vous en parle dans cet article d’ailleurs).

Formula One Simulator, mon tout premier jeu sur cpc

Allez, le voyage n’a que trop duré mais il me faut pourtant attendre la dernière étape, un peu comme un cérémoniel: le stationnement de la vieille Toyota Corrola dans ce garage bâti par mon paternel avec l’aide de mon frère. Étant gosse, j’imaginais ce dernier un peu comme la Batcave d’autant que le bâtiment était attenant à cet imposant chêne dont les branches semblaient être autant de mains noueuses protectrices sur le toit en tôle. Les araignées tapies dans leurs toiles et les pots de peinture dont le contenu a sûrement séché depuis bien longtemps apercevront tout au plus un gamin pressé d’essayer son nouveau jeu.

De retour sur cette île intérieure, je n’ai jamais été aussi proche de mon sanctuaire, désormais c’est entre le cpc 464 et moi que la compétition va se jouer. Quelques réglages d’usage comme choisir entre clavier/joystick et il nous sera demandé si nous souhaitons créer notre circuit. Au cas où l’inspiration n’est pas au rendez-vous des circuits sont inclus de base dans le soft. Il est également possible de jouer simultanément à deux, l’écran partagé sera de mise comme pour l’affrontement avec la machine.

La jouabilité est assez agréable, les graphismes sont, comme j’ai souvent tendance à le dire, sympathiques mais Scalextric n’est sûrement pas le meilleur jeu de la catégorie. Côté sonore le bruit des moteurs fatiguent assez vite et il n’y a aucune musique.

La météo concernant les paysages offerts par les divers circuits varieront aléatoirement mais l’état de l’asphalte restera le même. Sur la piste deux véhicules: rouge et bleu. Impossible ici de ne pas penser au dessin-animé « Pole Position » que je regardais assidûment à l’époque.  Petite astuce de « tricheur », en  poussant notre adversaire immédiatement vers la droite nous gagnerons instantanément la course… Aucun intérêt.

Quelle est leur vraie mission?

Après quelques courses, la curiosité me pousse à la création de circuit mais n’ayant pas l’âme d’un architecte je délaisse assez rapidement cette fonctionnalité qui est pourtant l’un des points forts du jeu (et qui comme dit un peu plus haut m’avait attiré!). Tout se fait avec le joystick (ou clavier selon le cas). Une fois terminé il est proposé de sauvegarder son œuvre afin de s’y essayer avec un second joueur par exemple. Ayant été souvent seul à jouer sur mon cpc je n’ai jamais pu tester cet aspect.

Alors que ce mercredi s’achève, que les moteurs ont cessé de rugir, une impression mitigée s’insinue en moi concernant Scalextric. Je suis bien sûr content d’avoir eu une nouvelle cassette pour mon cpc 464 mais une légère pointe de déception se fait sentir. Je reviendrais peu vers le logiciel de Leisure Genius néanmoins, après toutes ces années, je salue encore sa présentation soignée. 

Bouh le tricheur!


mardi 24 septembre 2024

L'étoile de l'hôtel

 1988. C’est l’une de ses matinées dominicales où mon paternel et moi sommes partis chercher le pain ainsi que le journal. La destination diffère cependant quelque peu car mon père souhaite ajouter un petit extra (souvent en provenance du traiteur local) pour égayer les papilles de cette journée. Direction la commune où se tient mon collège plus vaste que le village auquel nous sommes rattaché.

L’idée d’apercevoir mon collège ne m’enchante guère mais tout va bien puisque nous n’emprunterons pas la rue principale sur laquelle s’étend l’ombre massive bétonnée. Telle une forteresse de savoir mal placée, j’ai toujours ressenti un sentiment d’oppression à sa vue.  La départementale sur laquelle nous roulons, également empruntée par le bus chahuté durant la semaine, est bordée par des champs à perte de vue mais également une ligne ferrée désormais abandonnée ainsi ce qui semble être une exploitation céréalière à la morne silhouette. 

Sur le chemin, bien que je sois absorbé par mes pensées, il m’arrive de reconnaître des visages que je préfère oublier. Mais bientôt, tel un totem, un bâtiment nommé « hôtel du nord » fait son apparition, balayant de sa lumière cristalline les ombres d’un Mordor trop présent à mon goût en ces derniers instants.

Si un sourire se dessine timidement sur ce visage trop sérieux ( comme le disait Heath Ledger) c’est parce que la musique composée par Ben Daglish pour le jeu « North star »,édité sous l’égide de Gremlin cette même année connu une fois de plus avec la compilation « 12 jeux exceptionnels » sur 464, se joue en mon esprit. A cette époque (et c’est toujours un peu le cas actuellement) je fais beaucoup d’associations de ce type, en relation avec le monde de l’Amstrad cpc et toute sorte de choses. Ainsi, cet hôtel somme toute banal devient une référence à ce jeu dans lequel la station spatiale « North star » ne répond plus. En arrivant, nous ne pouvons que constater les dégâts occasionnés par les envahisseurs ayant pris possession des lieux. Notre mission consistera non seulement à éliminer ces derniers mais également à  venir en aide aux éventuels survivants.

Source: CPC POWER

Graphiquement la patte Gremlin est immédiatement reconnaissable, sympathique. Côté jouabilité, la difficulté du jeu résidera dans la maniabilité de notre perso puisqu’il faudra un temps de « freinage » à celui-ci avant qu’il ne s’arrête totalement occasionnant souvent des collisions mortelles avec l’ennemi. Notre arme principale sera ce bras robotique nous permettant d’envoyer paître les ennemis mais nous serons à même de trouver d’autres artefacts permettant d’améliorer notre efficacité, tout du moins sur le papier. Le scrolling horizontal se veut plutôt fluide mais la fenêtre de jeu est assez réduite. Pour couronner il nous faudra également surveiller notre niveau d’oxygène.

Je ne suis jamais parvenu à voir la fin de « North star » mais comme je l’écrivais quelques instants plus tôt, à la vue de cet hôtel (qui n’était pas bleu contrairement à la chanson de Chris Isaak) la musique de Ben Daglish se déclenchait automatiquement telle une main invisible actionnant le magnétophone logé dans un coin de ma tête. L’établissement semble toujours exister et, sans le savoir, ses propriétaires hébergent une partie de mes souvenirs.

samedi 21 septembre 2024

Venin lunaire

 1988. C’est un mois de janvier glacial qui règne sur ces terres volcaniques en sommeil. Le jour de Vénus s’est déjà estompé laissant place à celui de Saturne vivant lui même ces dernières heures. Je suis sous la véranda, plongée dans la pénombre, à tenter de percer cette profonde obscurité. Derrière moi, la porte vitrée de la cuisine laisse filtrer la lumière chaude  éclairant la table d’un repas familial animé. Les discussions vont bon train, quelques rires fusent parmi des membres de la famille qu'on ne voit pas souvent. Il faut dire que notre maison fait figure de point de ralliement à cette époque.

Oh, je ne compte pas rester très longtemps à baigner dans le froid mais j’ai été interpellé par le brouillard omniprésent, dense, ainsi que par l’herbe gelée mise en évidence par les lumières artificielles. Là, pendant ces quelques instants capturés à la volée j’ai tout simplement l’impression d’être sur l’astre cendré qui n’a pas répondu cette fois à l’appel de Nyx. 

Je suis soulagé de voir que mon départ inopiné est resté discret car j’éprouve le souhait soudain de jouer à « Venom strikes back » présent sur la compilation 12 jeux exceptionnels éditée par Gremlin cette même année sur Amstrad cpc. J’aime beaucoup les jeux de l’éditeur anglais souvent appuyés par la musique de Ben Daglish. Je trouve d’ailleurs celle de ce troisième et dernier épisode des agents du M.A.S.K sur la machine, excellente.

Les voilà, ils sont prêts, ils sauveront le monde

 Si vous avez grandi comme moi dans les années 80 je pense qu’il est inutile de vous présenter ce dessin-animé dont je ne manquais aucun épisode (tout du moins j’essayais). J’avais eu la chance d’avoir Dagger et son véhicule ainsi que l’hélicoptère de Mayhem. Comme tout le reste de mes affaires liées à ces précieux instants, le temps et les déménagements se sont repus des restes encore existants.

Allez, revenons au jeu. Sur Amstrad cpc M.A.S.K a eu le droit à trois adaptations. Le premier est également présent sur la compilation, celui-ci nous voyant incarner Matt Trakker au volant de sa célèbre Thunder Hawk. Je n’ai jamais réellement compris ce qu’il fallait faire, les tenants et aboutissants du jeu restant à la discrétion de mon incompréhension. Quant au second, j’aurais l’occasion de le connaître plus tard via une autre compil’ et j’avoue que c’est celui-ci qui aura ma préférence (à moi comme le chante Julien Clerc). Malgré son côté brouillon il me permettra d’assouvir ma soif de piloter les véhicules tel que Rhino (avec pharyngite selon le cas) par exemple. 

J'ai tant aimé les compils Gremlin

Troisième et dernier volet donc, « Venom Strikes Back » nous permet une nouvelle fois d’incarner Matt Trakker parti à la recherche de son fils Scott fait prisonnier par l’organisation V.E.N.O.M au cœur d’une base lunaire. Ici point de véhicules nous devrons mener nos recherches à pieds, avec moult gadgets dispersé sur notre route, nous permettant de répondre aux divers pièges tendus par notre ennemi juré. Mais attention car leur utilisation n’est pas sans limite et certaines portions de terrain (comme l’eau par exemple) sont à éviter absolument sous peine de « game over ».

Tant de nostalgie avec ces bandes de chargement

Graphiquement l’ensemble est plutôt sympathique, notre personnage est plutôt maniable mais il faut être précis dans certains sauts. Musicalement parlant, comme dit un peu plus tôt, la composition de Ben Daglish est inoubliable. La difficulté est de mise si bien que je n’en verrais jamais la fin. Malgré l’absence des véhicules donnant toute son essence au dessin-animé, Le soft détient une aura particulière à mes yeux, un peu comme tous les jeux Gremlin, une ambiance unique lorsque ces derniers s’exécutaient sur mon cpc mais au final, le jeu aurait très bien pu se nommer autrement.

La face cachée de la lune selon Gremlin

Alors que mes essais infructueux pour retrouver Scott s’achèvent, je ne peux m’empêcher une nouvelle fois de retourner sous la véranda afin de saluer cette nuit aux teintes mystérieuses. Derrière moi, le repas tire sa révérence lui aussi, les rires et conversations animées font désormais place à quelques bâillements à peine étouffés. J’avoue que la fatigue me gagne également mais avec la musique de Ben Daglish en tête, je souhaite encore profiter des faveurs de Nout en m’asseyant sur la banquette faite maison par mon paternel.

mercredi 18 septembre 2024

Saturday night Bat

 1995. C’est la fin d’une longue semaine de travail. Depuis peu je goûte aux « joies » des horaires alternés dans cette petite entreprise familiale de mécanique de précision. Le bâtiment est en réalité un vaste hangar ouvert aux quatre vents, composés de béton pour les murs, de tôles pour le toit. L’été, avec la chaleur produite par les machines en plus, l’endroit est un four. Lorsque la saison froide s’en vient, il est hors de question pour le patron de chauffer les lieux et ces damnées blocs d’aciers à commandes numériques se contentent de renvoyer le parfum nauséeux d’huile de coupe.

Quoiqu’il en soit il est à présent 21h00 et je quitte enfin mon poste en ce vendredi soir. L’air extérieur drapant de son manteau glacial les ombres, qui se dispersent au gré de la lumière crue d’un néon extérieur, surprend à peine. Les moteurs démarrent, avec peine pour certains, les chauffages de ces véhicules, modestes pour la plupart, sont soudainement sollicités. La lune est là, compagne des moments difficiles et du dégoût qui se saisit de moi aux alentours de 4h50 lorsque j’attends l’ouverture du lourd portail des lieux le lundi matin. Le court ballet des véhicules qui se pressent vers la sortie m’extrait de ces rêveries (rien à voir avec celles du promeneur solitaire), j’ai hâte de rentrer chez moi. 

Bientôt la nationale qui traverse la petite ville industrielle où je vis depuis peu voit un flot incessant de phares éclairer le marquage blanchâtre du bitume. La luciférine de ces insectes métalliques, qui se dirigent vers une destination offerte à la discrétion nocturne, éclipsent temporairement la pâle lumière des lampadaires parsemant les trottoirs alentours. Quelques heures plus tard, un peu comme dans la chanson « Moon over Bourbon Street » de Sting (inspirée par « Entretien avec un vampire » de Anne Rice), un piéton bénira peut-être pourtant ces halos municipaux. Quant aux étoiles, à leur firmament, elles n’ont guère d’écho dans ces cerveaux drainés par les gestes répétitifs d’une journée trop longue.

There's a moon over Borbon street tonight...

Attendez, j’y suis presque, oui, nous y voici. Ah, une voiture se trouve encore stationnée devant le garage de ce miteux appartement que je loue. Tant pis, je n’ai pas la force d’aller chercher le squatteur d’autant que parfois, dans le coin, les esprits s’échauffent rapidement. Allez, encore quelques pas et dame silence m’offrira ses bras…. Excepté si les murs aussi fins que le papier des cigarettes fumées par ma mère à quelques kilomètres de là en décident autrement. Il n’est pas rare de subir les querelles conjugales de mes voisins à ma gauche ou encore la musique de celui à ma droite. Après avoir ouvert à la volée la porte bon marché qu’un faible coup d’épaule suffirait à fracasser; j’entreprends de fermer mes volets accordéons attaqués par un début de rouille mais qui me protège néanmoins un peu du froid qui s’invite par la fenêtre simple vitrage. Une fois la petite lampe allumée, mon univers contenu dans cet espace d’à peine 21m² se dévoile. 

Oh, il n’y a pas grand chose! Un clic clac, une bibliothèque basse bringuebalante mais qui supporte un petit trésor: une micro chaîne stéréo de marque JVC achetée avec mon premier salaire. A cette époque j’écoute encore beaucoup de musique. Un peu plus loin, un autre meuble accueillera quant lui la télévision 36 cm d’une marque obscure qui disparaîtra dans l’abîme du temps chère à Lovecraft. Juste en dessous, un autre butin est discrètement rangé: La console Megadrive de Sega (le second modèle).

Quand c'était plus fort que toi

Achetée depuis peu avec Sonic 2 (eh oui, c’était le temps où la cartouche était encore incluse en physique avec la console, sans code, sans téléchargements ni compte à créer), cette dernière m’a permis de renouer un lien avec le jeu vidéo délaissé avec l’Amstrad cpc. Mais en ce vendredi soir je me sens trop fatigué pour jouer à quoique ce soit. Qui plus est, bien qu’excellentes,  j’avoue commencer à me lasser des aventures du hérisson bleu. Aussi, le reste de la soirée me verra affalé sur mon clic clac aux teintes tabac, devant un épisode de X-Files ou l’immortelle peut-être. Morphée ne tardera pas à venir solliciter mon attention, écartant peut-être par la même occasion l’appel devenu quasi habituel du patron de l’usine me demandant de revenir le samedi matin pour produire encore un peu plus de pièces, histoire d’avoir de l’avance sur les prochaines commandes.

Mon sommeil sera teinté par la lourdeur, abandonnant rêves et cauchemars le long du chemin esquissé par Nyx. A mon réveil, la matinée déjà bien avancée me murmure une autre réalité: les courses dans le super marché local, souvent bondé en ce jour de Saturne. Placards et frigo vides ne laissent planer aucun doute, je ne peux me soustraire à cette corvée. Cependant la perspective de faire également un saut dans le rayon jeu vidéo illumine cette morne perspective. En cet instant, concernant ce multimédia, il n’y a pas d’autre alternative car aucune boutique indépendante n’est présente, pas même dans le centre-ville. 

Je vous parle un peu de lui juste en dessous

Quelques instants plus tard, entre les denrées alimentaires, la boîte de « Batman Returns » reprenant les trois antagonistes principaux du film (1992) de Tim Burton trouve sa place. J’ai adoré le film appuyé par la musique de Danny Elfman et d’ailleurs, inutile ici de chercher la moindre subjectivité en ces lignes car j’apprécie énormément le travail du réalisateur.  Après avoir rangé à la hâte les diverses victuailles, je n’ai bien sûr qu’une idée en tête: essayer cette adaptation sans plus tarder! D’autant que le dernier jeu Batman auquel j’ai joué se trouvait être « Batman The Movie » sur mon Amstrad cpc 6128 devenu propriété de mon frère par la suite. C’est sans compter sur l’appel de mon paternel qui me demande instamment de l’aider pour un obscur déplacement de meubles.

Haut les cœurs, il me faudra attendre dame nocturne avant de m’essayer au jeu. En ce samedi soir où les appartements alentours se veulent délaisser par la plupart de leurs occupants, il est temps pour moi de partir vers Gotham City où l’hiver sévit. Alors que le logo Sega s’estompe, la première émotion m’est procurée par la musique mélancolique tout à fait dans le ton du long-métrage de Tim Burton, puis vient la scène où la reine des glaces fait une chute vertigineuse. Il ne m’en faut pas plus pour dessiner la scène en mon esprit, ce qui me donne envie de revoir le film. 

Les compositions suivantes me feront un peu moins cet effet mais sont, pour certaines, en adéquation avec l’ensemble. Le jeu est clairement orienté plateformes et si le premier niveau ne pose pas réellement de difficulté, il n’en sera pas de même pour les suivants. Graphiquement parlant je suis également assez éblouis, venant de l’Amstrad cpc la megadrive m’impressionne forcément. La trame principale du jeu reprend celle du long métrage, défaire le pingouin protégé par ses acolytes du cirque du triangle rouge sans oublier Catwoman (incarnée sublimement par Michelle Pfeiffer) qui viendra parfois semer le trouble sur notre passage.

Alors que les différents gadgets de Bruce Wayne m’aident à avancer tant bien que mal, certains niveaux appuyés par le thème musical me replongent dans l’esthétisme gothique de Tim Burton. Je me souviens d’ailleurs encore du poster de « Batman Returns » fièrement accroché au-dessus de mon bureau du temps de l’Amstrad cpc 6128, juste avant de partir pour le service militaire en 1992.

Les heures défilent, mes nouveaux essais après chaque « game over » également et c’est en butant sur le niveau des égouts que je me déciderais à arrêter là pour cette fois. Je ne parviendrais jamais à aller au-delà. Morphée fait son retour lui aussi, les mains fermement posées sur mes épaules, le sommeil me gagne aussi lourd que la nuit précédente mais bordé cette fois-ci par l’empreinte de cette adaptation dont je garde un excellent souvenir.

vendredi 13 septembre 2024

Eurydice s'en est allée

 Deux heures à rouler sous une pluie d’enfer (sans Christian Slater), deux heures à déjouer, tant bien que mal, les pièges d’une route sinueuse. La fatigue, telle une amante doucereuse, m’étreint bientôt de son baiser langoureux. Mais je ne dois pas céder. Là, quelque part, Eurydice m’attend et, pardonnez moi cet écart mais, je suis méchamment à la bourre.

 Je ne répondrai à l’invitation lancée par Loriciels en 1985 sur Amstrad cpc qu’en 1989, avec mon 6128. Aussi n’ai-je pas le temps de m’arrêter. Mais les larmes de Nyx scellent un pacte avec l’asphalte (néanmoins aucun camion n’est incriminé dans l’accident) et mon véhicule emprunte bientôt l’autoroute de l’enfer comme le chante AC/DC.

 Le choc est rude, laissé à la discrétion de ce champ situé au milieu de nulle part et bientôt un grand vide s’empare de moi. C’est donc à cela que ressemble la mort? Au loin, une lueur se rapproche rapidement. Est-ce le porteur de lumière? Non, il emprunte l'autre nom de l'ange déchu: Satan! Tout est si instinctif soudainement! Mais alors que mon corps telle une poupée désarticulée est maintenu artificiellement en vie, mon âme sait déjà que son périple commence: emprunter le chemin semé d’embûches qui la mènera hors des enfers. 

En rouge et noir...

 Les quelques lignes ci-dessus, quelque peu remaniées par mes soins pour cet article, constituent le scénario de Orphée: voyages aux enfers édité par Loriciels en 1985 donc.  En 1989 il s’agit pour moi encore d’un mercredi après-midi, rivé sur mon 6128, explorant une disquette Amsoft peut-être prêtée par Anthony ou Nicolas. Je suis alors très fan des jeux d’aventure si bien que je me lance dans ce voyage au cœur des enfers en compagnie de Yurk délivré quelques instants plus tôt.

Yurk, fidèle compagnon de route...

 Le dinosaure prend un peu de place dans ma chambre mais je ne peux lui en vouloir car il va sacrément m’aider au fil de ma progression. Progresser n’est d’ailleurs pas une mince affaire car chaque action manquée est susceptible de nous mener à la mort. Alors j’entreprends de prendre des notes (oubliez le plan, mon esprit est incapable d’en faire un!). Je meurs…. Souvent. Cependant certaines actions sont couronnées de succès et j’exulte presque lorsque je parviens à avancer ne serait-ce qu’un tout petit peu plus que la fois précédente. Il faut dire que le moteur texte est plutôt austère e et, comme pour la plupart des jeux de ce type à l’époque, il est parfois difficile de deviner l’action avec un objet présent à l’écran. 

La sorcière de Cauldron peut-être?

 Esthétiquement parlant les enfers sont colorées, graphiquement assez riche ai-je envie de dire d’autant qu’il s’agit d’un jeu sorti dans les débuts de la machine. Certains passages sont vocaux (comme celui avec Yop le démon, espérons qu’il n’a pas craché dedans), d’ailleurs nous obtiendrons certains indices de cette manière la prise de notes devenant de ce fait indispensable.

 Malgré mes efforts, avec une rencontre infortunée avec le gardien des marais, je ne parviendrai jamais à atteindre la sortie de ce royaume infernal. De mémoire, un peu plus tard, je m’appuierais de la rubrique « à l’heure où blanchit la campagne » du magazine Amstrad Cent Pour Cent pour enfin voir le dénouement de l’aventure.

Entre temps, lassée d’attendre, Eurydice s'en est allée.

mercredi 11 septembre 2024

Briser les chaînes

 1988. Le printemps s’est installé depuis un petit moment déjà, s’apprêtant bientôt à céder la place au futur été qui s’annonce. Bien que nous soyons en pleine semaine, cette soirée jupitérienne a quelque peu des saveurs estivales. 

Le dîner vient à peine de se terminer que je foule déjà les graviers dispersés devant la véranda il y a quelques années par mon père. Cette dernière voit d’ailleurs ses baies vitrées ouvertes au quatre vents, laissant parfois des pies téméraires venir jouer les curieuses et aussi subtiliser les croquettes du chien. En parlant de canidé, celui dont le pelage éthéré mue au travers des cycles temporels deviendra loup d’ici quelques heures.

Mais en cet instant, les mains enfouies dans les poches de mon jean trop large pour moi lequel est complété par une veste de type « baseball », je m’imprègne de cette quiétude rurale que rien ne semble pouvoir troubler. D’ici quelques semaines, le gîte rural tout juste séparé par une haie, demeure des passereaux, s’animera sous les discussions de touristes venus de tous horizons. Malgré ce sursaut, ces derniers sont somme toute  discrets en général.

Une mobylette fort bruyante, dont le conducteur se prend peut-être pour Jesse Mach dans Tonnerre Mécanique, se chargera de briser ce précieux moment. C’est l’occasion pour moi de retrouver mon cpc 464 et la compilation Dix Sur Dix déjà évoquée sur le blog. Ici, je sais déjà quel jeu chargera ses données via le lecteur cassette: Shackled édité par U.S Gold en 1988, adaptation d’une borne arcade inconnue pour ma part.

Dans Shackled, au cœur de divers labyrinthes, nous devons secourir nos compagnons de route emprisonnés. En plus de leur compagnie, ces derniers nous permettront d’utiliser leurs armes. Graphiquement, tout autant que musicalement parlant, le jeu se veut sympathique. Si vous avez déjà joué à Gauntlet, il est assez aisé de faire le rapprochement. Mais en cet instant je ne connais pas cet autre titre d’ U.S Gold qui s’invitera chez moi quelques mois plus tard, pour noël plus précisément.

Je dois avouer n’avoir pas tous compris dans Shackled concernant les armes apparaissant à la droite de l’écran d’autant que la notice du jeu se veut plutôt avare en détails. Aussi me contentais-je de tirer à tout va. Les ennemis, variés, peuvent également se cacher dans certaines cellules, venant aspirer notre santé représentée sous forme de points de vie.

Les niveaux s’enchaînent si bien que je ne verrais pas le temps défiler. Bien que l’air se veut annonciateur des grandes vacances, les cours ne sont pas encore terminés et c’est à regret que je dois éteindre mon cpc 464. Je ne connaîtrais jamais la fin de Shackled, ma patience ne me le permettant pas. Malgré son côté répétitif j’en conserve un agréable souvenir comme pour tous les jeux présents sur cette compilation.


vendredi 6 septembre 2024

Le bout du tunnel

 1989. C’est une matinée dominicale en proie à la grisaille. La première partie de mon rituel vient de s’achever, à savoir regarder la rediffusion d’un film sur Canal +. De mémoire, il s’agit de Deathwish 3 avec Charles Bronson (Le justicier de New York pour son titre français avec pétoire et moustache obligatoire). Alors que Paul Kersey, un sac dans chaque main, quitte les quartiers mal famés de la grosse pomme (cette image de fin restera à jamais gravée en mon esprit) je m’apprête  également à délaisser le salon.

Moustache et pétoire obligatoires!

 Emmitouflé dans ma robe de chambre au parfum d’usure, c’est sans hâte que j’éteins l’imposante télévision cathodique Grundig avec sa télécommande qui n’est pas sans rappeler le panneau de commande d’un vaisseau spatial. Non loin de là, mon chien Titi  profite des flammes de l’âtre pour réchauffer son ventre rassasié, allongé les quatre pattes en l’air sur le carrelage gris ébréché posé jadis par mon père. Encore quelques minutes, oui, je profite de ces instants dont le silence n’est troublé que par le crépitement des flammes et… les ronflements de l’animal. 

 Allez, me voici à présent toutes savates traînantes traversant la cuisine/salle à manger puis la véranda pour atteindre mon sanctuaire où mon cpc 6128 m’attend impassiblement. Un rapide regard par la fenêtre, alors que j’entreprends d’allumer la machine, m’indique que la pluie ne tardera pas. Tous les signes sont donc là  pour explorer la disquette Amsoft prêté par Anthony, un copain de classe. Après un CAT, c’est sans grande conviction que j’entreprends d’essayer The Duct, un jeu édité par Gremlin en 1988 dans lequel nous contrôlons un buggy au cœur d’une série de tunnels. 

 C’est loin d’être une mince affaire car en plus des ennemis et pièges divers qui s’accapareront notre énergie, nous devrons également prendre garde à la consommation de carburant. Il sera bien entendu possible de nous ravitailler sur la route, chose néanmoins peu aisée. Autant le dire tout de suite, je n’ai jamais été très loin dans le jeu. Malgré ses qualités, notamment sa fluidité, je ne parviens pas à accrocher au style graphique du jeu.

Un écran que je verrais souvent

 Après plusieurs essais infructueux, j’abandonnerai définitivement The Duct pour retrouver Charles Bronson sur Deathwish 3, appuyé par la musique de Ben Daglish, lui aussi présent sur la disquette. Absorbé dans ma lutte contre la criminalité, je ne verrais pas l’heure du repas approcher. A regret, je dois me détacher de l’Amstrad cpc pour me diriger vers la table de la salle à manger, un air de déjà-vu en tête.

mercredi 4 septembre 2024

Le combattant du Nil

 1989. Parant les assauts d’un soleil bien décidé à en découdre, tels des boucliers, les volets de ma chambre sont fermés. Alors que la température extérieure avoisine les 40 degrés à l’ombre (comme l’affirmait Vincent Perrot), mon sanctuaire au papier peint bleu pastel est ainsi plongé dans la pénombre. 

Mais laissez moi… Non, pas chanter mais vous décrire un peu la disposition des lieux. Il y a tout d’abord l’objet de cet article, mon cpc 6128 trônant fièrement sur ce meuble dit « informatique » couleur pin naturel avec sa tablette coulissante. Depuis quelques temps, sa place a changé, il est désormais placé juste à côté de la porte. Ainsi, je n’ai qu’à tourner la tête dans le cas d’une entrée impromptue en ma chambre. Ceci peut s’avérer très pratique alors que ma chance aux cartes change de mains ,  la silhouette féminine sur mon écran me laissant ainsi entrevoir les ailes d’un certain désir.

A ma gauche, il y a cette étagère bricolée par mon paternel, bancale, ajustée dans ce renfoncement, dernier témoins de cette ancienne remise devenue ma chambre donc. La planche brute supportant jadis l’imposante télévision cathodique a depuis quelques temps cédé la place, tout comme l’appareil dont je ne me servais plus. Contre le mur, près de la fenêtre, mon bureau dont les tiroirs ont été délestés de leur contenu scolaire par la période estivale. Ainsi mes anciens échecs mathématiques se sont vus croqués comme l’auraient souligné Claude Pierrard, Isidore et clémentine tout du moins avant 1987. 

Et puis il y a… mais si je vous faisais un plan? Je vous invite à regarder juste en dessous de ce fait. A cette époque j’aime souvent changer la disposition de mes meubles même si au final les configurations possibles sont assez restreintes.

Admirez le plan de l'architecte...

Pour compléter l’ensemble, une moquette grise viendra feutrer mes pas inexorablement attirés par Cauldron lors de ces samedis soir charmés par Sœur Lune. Mais pour l’heure Rê est le seigneur de ces cieux au bleu profond. Si je parle du dieu égyptien c’est parce que malgré la canicule, mes pas m’ont menés au cœur du désert, celui du temps plus précisément, avec Fighting warrior édité par Melbourne House en 1985.

Découvert via la compilation 6 Pak de Elite sur une disquette de flibustier, nous y incarnons un combattant parti secourir la princesse Thaya retenue captive par le pharaon. Cette dernière sera bientôt livrée en sacrifice aux dieux si nous ne parvenons pas à défaire les ennemis disposés sur notre chemin. 

Malgré sa musique répétitive tout autant que ses combats, je suis pourtant tout de suite conquis par Fighting warrior. Cependant j’aime beaucoup les graphismes avec les inévitables pyramides comme décors de fond nous accompagnant durant notre périple. Les mouvements de notre guerriers sont lents, aussi il nous faudra anticiper ceux des adversaires d’autant que des pièges annexes telles ces flèches surgissant de nulle part viendront nous ôter quelques points de vie. 

Des vases, même si ils ne sont pas canopes, seront parsemés sur notre route et si nous parvenons à leur porter un coup de sabre ces derniers seront capable de mettre hors d’état de nuire instantanément certains adversaires. D’ailleurs, si les ennemis sont sur le point de trépasser, leur être clignotera. Il en sera de même pour nous.

Je parviendrais à défaire l’assise du Pharaon et ainsi Thaya sera en mesure de fuir l’avidité sacrificielle des Dieux. Si j’ai autant apprécié le jeu malgré tous ses défauts, c’est sans doute parce que, étant plus jeune, j’étais très porté sur l’Égypte ancienne, fasciné par l’histoire de cette civilisation. C’est toujours le cas aujourd’hui avec peut-être un peu moins de ferveur ce qui ne m’empêchera pas, au détour du Nil, d’effectuer un voyage afin d’effleurer brièvement les lignes du passé et de l’histoire. Je resterai à jamais marqué par la vallée des rois et le musée du Caire me retrouvant à quelques centimètres du masque de Toutânkhamon

Désormais, lorsque le guerrier de fighting warrior foule de nouveau le sol de l’Amstrad cpc, c’est le cœur emplis de souvenirs que je guide ses mouvements. Ceux de cette après-midi d’été appartenant désormais à 1989 bien entendu mais également les images de ce voyage dont les seules témoins sont ces deux statues à l’effigie de Bastet, m’accompagnant d’ailleurs lors de l’écriture de cet article; babioles touristiques dénichées dans une minuscule boutique que Terry Pratchett n’aurait pas renié dans son septième livre du Disque-Monde. Quelque part, les chats d’Ulthar ont peut-être approuvé mon choix.