dimanche 27 août 2023

Five-A-Side birthday

 1988. Mon second anniversaire accompagné par mon cpc 464 est finalement arrivé. Pour fêter l'occasion, un copain, plutôt le fils d'une connaissance du côté de mes parents vient passer une petite partie de ce dimanche après-midi avec moi. Ce dernier apprécie beaucoup le sport dédié au ballon rond et c'est quelque peu sans surprise qu'une fois les atours du papier cadeau désormais devenu chose froissée que je découvre un jeu de foot: European 5-A-Side.

Ouais.... trop bien...merci....

Si vous avez déjà parcouru les articles de mon blog concernant l'Amstrad cpc, vous savez déjà que je n'apprécie guère ce sport. Je feins donc une politesse d'usage en remerciant mon invité car après tout il s'est déjà donné la peine de me faire un cadeau. Sans tarder, nous allons essayer en ma chambre ce nouveau soft édité par Silverbird cette même année donc. L'intérêt de mon "pote" du moment se porte naturellement sur le cpc 464 car il n'a pas encore d'ordinateur quant à moi, travaillant ma politesse jusqu'au bout je consulte la notice imprimée au dos de la jaquette. Les instructions sont plutôt succinctes ce qui n'est pas pour me déplaire. Pendant les huit minutes de chargement (bon là je triche, ma mémoire a utilisé l'anti-sèche de l'émulateur), le passionné qui sommeille en mon invité me parle des différentes divisions... Si mon oreille physique l'entend, mon esprit lui s'est déjà fait la malle. Mon regard passe de la jaquette à l'écran de chargement et notre attention se voit brusquement arrachée par une voix digitalisée hurlante cédant la place à une musique plutôt sympa en réalité. 

Là encore pas trop d'options compliquées, nous optons d'emblée pour le jeu à deux et quelques minutes de matchs histoire de voir. Au dehors, un soleil automnale étend ses rayons sur les arbres se parant d'une couleur jaunâtre pour tenter de sédurie Hélios. Ce tableau me donne fortement envie de troquer l'ennui qui m'envahit contre une marche sous les arbres qui ne tarderont pas à laisser s'échapper les souvenirs d'un printemps si vite passé. Le jeu n'est pas très beau, les sportifs sont vus du dessus et nous devinons les spectateurs via le brouhaha ambiant. La voix tonitruante fait son retour en annonçant le début du match et certaines actions. Oubliez les fautes et sorties, elles semblent avoir été balayées d'un bon coup de pied laissant le ballon rebondir sur les côtés. Je laisse mon invité gagner, les minutes s'égrainent et il est bientôt temps pour lui de prendre congé, je le remercie une nouvelle fois. 

Une fois le calme revenu, tout en regardant le noyer juste en face de ma fenêtre de chambre, je range la cassette au fond du carton mal découpé accueillant depuis le début mes précieuses cassettes (Golum!)... De mémoire je ne relancerais European Five-A-Side qu'une seule fois, lorsque l’ennui s'emparera de moi au détour d'un morne jour. Les instants suivants entendront mes pas crissants sous les quelques feuilles tombées das arbres.  

dimanche 20 août 2023

Directive 4

 1989, dimanche. C'est l'un de ces soirs où l'éclairage public du village voisin se pare d'une morne perspective. Écrit tel quel, cela peut paraître idiot, après tout les silhouettes droites vêtues de mousses projetant inlassablement leur lumière jaunâtres sur l'asphalte font état de la même teinte quelque soit le jour de la semaine.  Ma mélancolie hivernale ne l'entend pas de cette oreille et pour elle ces lumières du dimanche soir annonce la funeste fin du weekend. 

Brigade du dimanche soir

Mais il reste encore quelques heures, quelques précieux instants avant que Morphée ne m'attire à lui. Alors hors de question de se laisser abattre, j'allume mon cpc 6128, mon choix concernant le jeu qui va me faire oublier la reprise des cours  est déjà fait: Robocop édité par Ocean cette même année, adaptation du film de Paul Verhoeven.  Après quelques rapides minutes de chargement, le thème principal composé par Jonathan Dunn, magnifique, va alimenter un peu plus ma mélancolie. Je l'écoute d'ailleurs jusqu'au bout, mon regard passant de l'écran à la boîte en carton rigide qui contenait un poster reprenant l'affiche du film et disposé depuis sur les murs de ma chambre. 

Je connais déjà le jeu pour l'avoir terminé plusieurs fois, il n'y aucune vantardise derrière ces propos, le soft n'étant pas très difficile. Il reprend d'ailleurs quelques moments importants du film notamment l'affrontement avec le ED-209, les aficionados du long-métrage savent de quoi je parle n'est-ce pas? Cette adaptation me fait penser à celle de Batman the movie et c'est quelque peu logique dans le sens où il s'agit de la même équipe derrière la programmation: Dawn Drake et Mike Lamb

Fichue directive 4!

Quelques niveaux plus tard, avec les remerciements du président d'OCP (pas celui d'art studio), mon sac bleu essoufflé, affalé contre mon bureau, se charge de me rappeler l'évidence, le weekend est sur le point de s'achever. Après avoir éteint le cpc et procéder à un rangement hâtif, la soirée s'achève avec la lecture de "l'année du loup-garou" de Stephen King... J'ai déjà hâte que cette future semaine se termine!

jeudi 10 août 2023

Phantom CPC Club

 1988. La rentrée est actée depuis quelques temps déjà et c’est une nouvelle journée de collège, difficile, qui s’achève pour ma part. En mon odorat flottent encore les effluves du déjeuner de la cantine, avec son poisson trop cuit et ses épinards formant une bouillie informe que le film de Richard Fleischer, « Green Soylent » n’aurait pas renié. Parallèlement les surveillants mâles jouent les cadors devant les classes de troisième en terrorisant les sixièmes. Ces derniers en ont d’ailleurs pour leur grade, appelés comme des chiens par un « pion » boursouflé par la testostérone avec son blouson aviateur style « Tom Cruise du pauvre » et un soupçon de « j’ai tout vu, j’ai tout fait ». 

Mais pour l’heure, là, en ma chambre arborant une aura paisible, je peux compter sur mon Amstrad cpc 464 pour me faire oublier cette sale journée, m’encourager pour la suivante en attendant le week-end et surtout les vacances. Il y a quelques temps de cela, lors d’un détour par l’enseigne « Majuscule », un peu comme un encouragement à donner tout ce que j’ai pour cette nouvelle année scolaire, je me vois offrir un jeu: Phantom Club édité par Ocean cette même année. 

Disons le tout de suite, malgré le talent de Bob Wakelin transparaissant sur la jaquette, la déception est quelque peu au rendez-vous. Je ne comprends pas trop ce qu’il faut faire dans ce club de super héros affrontant les forces du mal. J’aime beaucoup cependant la musique du menu principale mais cela ne suffira pas à combler mon errance au fil des pièces teintées par des graphismes criards en 3d iso. La progression n’est pourtant pas désagréable mais je ne verrais jamais la fin du jeu.

Le talent de Bob Wakelin, encore une fois.

Ainsi, au détour de salles gardées par divers ennemis, je lance mon rayon psychique sans grande conviction moi qui suis alors adepte des comics Marvel et DC Comics à l’époque. Je me souviens d’ailleurs avoir écrit à Marvel pour poser une question sur l’origine d’un super héros en particulier (la mémoire me fait défaut sur le personnage en question).

Leur réponse s’est voulue laconique, un peu comme le SAV de Ubi Soft lorsque je leur avais signalé un défaut sur « L’œil de Set ». Après toutes ces années, je garde néanmoins un souvenir particulier de « Phantom Club », chargeant le jeu pour écouter sa musique d’intro alors que mon regard se perdait tantôt au cœur des pages d’Amstrad Cent Pour Cent tantôt dans l’horizon chargé de transmettre les messages d’un printemps au mille promesses.

mardi 8 août 2023

Leus Warous

C’est un peu toujours la même chose. Les nuits de pleine lune se suivent et se ressemblent. Je les attends, là, dans ce vieux fauteuil au cuir souffrant avec son rembourrage hémorragique. Comme à son habitude, elle passera ta tête par l’encadrement, m’offrira un de ses timides sourires puis refermera la porte pudiquement. 

C’est très douloureux, ça l’est toujours. Parfois je perds des dents, mes mains se déforment comme si elles se brisaient… la liste serait longue pour décrire ici toutes les souffrances que j’endure. A chaque fois je me fais la promesse de ne pas hurler mais en vain, la douleur est trop forte. Si j’écris ces lignes c’est surtout pour me souvenir, histoire d’avoir des repères pour la prochaine fois car oui, je perds la mémoire, pas seulement une fois transformé mais également après. Elle me dit que c’est normal, que je ne dois pas m’en faire, qu’elle sera toujours là quoiqu’il arrive. 

Lorsque je rentre, la queue entre les jambes, juste avant que l’aube n’efface les étoiles, elle m’attend. Elle panse mes plaies, m’aide à me laver et il arrive que nous fassions l’amour si je ne suis pas trop épuisé. La plupart du temps je m’endors dans ses bras, nu, elle vêtue en tout et pour tout de bandes de tissu couvrant pudiquement son anatomie. Il me semble que ces sous-vêtements ne sont plus d’actualité, enfin, je crois car je ne connais pas très bien le nouveau monde. Juste avant que le sommeil n’arrive, mon regard se perd sur l’étoile de Sirius s’estompant dans les lueurs du jour baigné par l’aura de son parfum, subtil mélange de fleurs et de mort. Je sens ses longs cheveux noirs sur ma peau, ses bras qui m’enserrent, elle me parle mais je ne comprends rien de ce qu’elle dit, je suis trop fatigué. 

C’est dans l’après-midi que je me réveille, seul. Elle rentrera un peu plus tard avec un sac de provisions en papier garni de nourriture. Il y a surtout des légumes et des aliments de base, « c’est bon pour ce que tu as » me dit-elle à chaque fois en souriant. Après un repas léger, elle inspecte de nouveau mes plaies et y applique un baume de sa confection en murmurant des choses sans doute inaudibles pour l’oreille humaine.  Elle essaye de me faire rappeler les évènements de la nuit précédente. Parfois des images, des odeurs reviennent. Le béton, les bâtiments, les fumées toxiques, les pièges…. Il y en a partout. Je me heurte contre eux, mes pattes sont entravées, les fumées des cheminées d’usine obscurcissent le ciel comme lors d’une ère sombre. Mais il y a quand même le parfum de l’humus, les chouettes qui hululent ou encore les chiens qui jappent en se cachant à mon passage. 

Il y a aussi l’odeur du sang, je bouffe souvent des gallinacés (il me reste parfois des plumes dans la gueule ce qui ne manque pas de la faire rire lorsqu’elle me les retire) et parfois des êtres humains. Lorsqu’elle en prend connaissance, je peux être sûr qu’elle reviendra avec le journal local afin de consulter les faits divers. En général, il est fait état d’une personne qui s’est fait attaquer par une bête sauvage. Je lis toujours ces passages avec appréhension, n’ayant aucun doute sur le fait que mon autre moi est incriminé. Elle pose alors sa main gauche délicatement sur moi et malgré l’absence de chaleur de sa peau, cette dernière me rassure. 

Parfois, souvent même, lorsque j’attends « l’instant » sur mon fauteuil, je me rappelle les nuits d’encre, de celles qui laissent briller les étoiles en leur sein, loin de la pollution lumineuse actuelle, loin du béton. Je me revois, comme si c’était hier, me rouler dans ce champ de fleurs bleues, l’origine de mon mal. Lorsqu’elle s’isole à son tour pour travailler ses décoctions, certaines effluves me rappellent ces contrées fleuries… à présent elles ne sont plus et les champs ont été remplacés par des terrains agricoles exploités à outrance, des piscines privées, des grands magasins où je ne sais quoi encore. Les lieux dans lesquels j’évolue à présent me sont hostiles…. Mais je la sens, là, derrière les nuages, elle arrive, j’ai déjà mal aux mains…. Avant d’oublier, je suis Archibald Lubin et, pour sûr, je suis d’ailleurs.

 Illustration inspirée par Skyrim: Dawnguard de Bethesda Software, initialement dédiée pour l'un de mes autres textes.