1989 – Samedi après-midi. Mon père s’affaire à poser un néon au-dessus d’un tableau peint par mon frère sur la cloison séparant la salle à manger du couloir d’entrée. Ce dernier représente notre maison. Bientôt, le bruit du tournevis cède la place à divers termes peu flatteurs, brisant ma concentration plongée dans une copie double. Oui, car mine de rien, moi aussi j’ai du boulot et une fois de plus ce dernier me motive au plus haut point: Rédaction libre pour le cours de français. Au-dehors, le ciel s’assombrit, l’orage nous prévient de sa venue via quelques coups de tonnerre lointains, étendant par la même occasion son ombre sur la grande table recouverte d’une toile cirée où se mélangent affaires scolaire et outils.
Je lève la tête, l’entreprise de mon paternel semble peu fructueuse, le néon est de travers mais je n’ose rien dire ne souhaitant pas perdre le fil de mon inspiration. Une fois de plus je décide de mettre en avant le personnage d’un jeu Amstrad CPC: Artura édité par Gremlin Software et que j’ai eu via la compilation « 12 jeux fantastiques ». Pour moi, c’est sûr, avec cette aventure mêlant médiéval et fantastique je suis obligé d’avoir une bonne note! J’aime beaucoup ce jeu et en écrivant je revois les phases de voyages avec les runes amassées. Albion devient ma patrie le temps de quelques pas avec Artura, partie à la recherche de Nimue, apprentie de Merdyn, soustraite à ce dernier par la vile Morgause. Bien entendu, la musique de Ben Daglish contribue fortement à l’ensemble, je ne me lasse pas de l’écouter d’autant que je suis désormais possesseur d’un Amstrad CPC 6128 et bénéficie de la rapidité du chargement disquette.
Je n’ai jamais atteint la fin du jeu, n’étant pas très à l’aise avec la conception de cartes, je me perdais au fil des allées tantôt verdoyantes, tantôt enténébrés. J’étais avant tout envoûté par l’ambiance du soft, ses graphismes, l’apaisement qu’il me procurait, ses sons. J’avais réussi à collecter quelques runes mais pas suffisamment pour trouver et défaire Maurgause, demi-sœur d’Artura fils de Pendragon. Perdu en mes pensées, la satisfaction de mon père quant à son travail achevé bouscule définitivement ma torpeur et détache mon regard des quelques lignes en cours d’écriture. Le néon est enfin fixé, alimenté par une prise que l’on branche. La lumière émise est trop crue pour le tableau mais je réserve mon opinion pour le silence, me contentant d’un vague sourire. Et puis ma rédaction attends toujours sa suite, son épilogue et de mémoire, Artura sauvera Nimue en touchant un cristal mystérieux une fois Morgause déchue. Au-dehors, l’orage semble avoir changé de camp, se dispersant au grès d’une luminosité indécise d’automne, souffle les feuilles jaunies qui virevoltent en habillant temporairement les champs. Un peu plus tard je couche les derniers mots de « mon œuvre » dont je suis fier, achevant ainsi les devoirs du lundi.
Quelques temps après, ma copie m’est rendu et l’enseignement que je reçu ce jour se transformait en une leçon d’humilité: 14/20. J’étais un peu déçu, néanmoins, après toutes ces années, je me dis que le souvenir gardé de cette après-midi de 1989 n’a pas besoin de note…
Ma curiosité m'a amené sur ton blog, et je trouve que tu as un certain talent pour l'écriture, serais-tu prof de français !? :)
RépondreSupprimerTu serais même en mesure de faire un livre, quant à ta rencontre avec l'Amstrad, comme un voyage initiatique pour le lecteur, un parcours formidable, lié à ton évolution et ton rapport à cette machine à travers les âges....
Merci pour ton commentaire! Non, je ne suis pas prof de français, loin de là, j'essaye juste de faire attention à mon orthographe, grammaire, mais je sais que des fautes sont encore disséminées dans mes articles:) .Même si le monde de l'écriture m'interpelle depuis longtemps, je ne pense pas être en mesure d'écrire un livre. Encore merci, à bientôt.
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